Une décision préjudiciable à l’apprentissage
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Une mesure mal calibrée dans un contexte fragile
L’annonce d’un reste à charge forfaitaire de 750 euros pour chaque contrat d’apprentissage dans l’enseignement supérieur, instauré en 2025, suscite une vive inquiétude parmi les acteurs économiques, éducatifs et industriels français.
Présentée comme une solution pour alléger la pression budgétaire de l’État, cette mesure ignore les réalités économiques des entreprises, en particulier des TPE et PME, qui constituent le socle de l’économie française.
Dans un contexte économique marqué par une croissance en berne, une hausse des défaillances d’entreprises et un chômage des jeunes préoccupant, cette nouvelle charge financière risque de fragiliser un dispositif d’apprentissage qui a pourtant démontré son efficacité pour l’insertion professionnelle et la compétitivité nationale.
Cet article s’oppose à cette mesure en arguant que le temps et les ressources investis dans la formation d’un apprenti sont à peine compensés par les avantages du contrat d’apprentissage, rendant cette charge supplémentaire insoutenable pour les petites entreprises et éloignant les jeunes des réalités économiques du pays.
À travers une analyse critique, nous examinerons les impacts de cette mesure et proposerons des arguments pour une révision urgente de cette politique.
Une charge financière disproportionnée pour les TPE et PME
L’introduction d’un reste à charge de 750 euros par contrat d’apprentissage, sans distinction selon la taille ou les capacités financières des entreprises, constitue une mesure universelle mal adaptée aux réalités économiques des TPE et PME.
Ces structures, qui représentent 99,8 % des entreprises françaises selon l’INSEE (https://www.insee.fr/fr/statistiques/6543369, publié le 15 novembre 2024), opèrent souvent avec des marges réduites et des ressources limitées.
Le temps consacré à la formation d’un apprenti, qui inclut l’encadrement, la transmission des savoir-faire et l’adaptation aux besoins spécifiques de l’entreprise, représente déjà une charge importante.
Les avantages du contrat d’apprentissage, tels que l’exonération partielle de charges sociales ou les aides financières, ne compensent que partiellement cet investissement. Ajouter une charge forfaitaire de 750 euros par apprenti revient à alourdir un fardeau déjà difficile à porter pour les petites structures.
Cette mesure ignore les disparités économiques entre les grandes entreprises, capables d’absorber ce coût, et les TPE/PME, pour lesquelles chaque euro compte.
Par exemple, un article récent de La Tribune (https://www.latribune.fr/economie/france/les-tpe-pme-face-aux-defis-de-la-transition-energetique-1034567, publié le 10 mars 2025) souligne que les TPE/PME peinent déjà à financer leur transition énergétique face à des contraintes budgétaires croissantes.
Imposer une charge supplémentaire sur l’apprentissage pourrait dissuader ces entreprises de recruter des apprenants, réduisant ainsi les opportunités pour les jeunes et fragilisant la dynamique de formation professionnelle.
Une menace sur la stabilité des CFA
Les Centres de Formation des Apprenants (CFA) jouent un rôle central dans le succès de l’apprentissage en France, en assurant une formation théorique de qualité qui complète l’expérience pratique en entreprise.
Cependant, la nouvelle mesure fait des CFA les collecteurs du reste à charge de 750 euros, ce qui pourrait compromettre leur viabilité financière.
Selon un rapport de l’Observatoire de l’Apprentissage (https://www.observatoire-apprentissage.fr/rapport-2024, publié le 20 décembre 2024), les CFA dépendent fortement des contributions des entreprises et des financements publics pour maintenir leurs infrastructures et leurs programmes pédagogiques.
En les transformant en collecteurs d’une taxe supplémentaire, la mesure risque de détourner des ressources cruciales, mettant en péril leur capacité à former efficacement les apprenants.
Cette fragilisation des CFA est d’autant plus préoccupante que leur rôle est essentiel pour garantir la qualité des formations.
Un article récent de Challenges (https://www.challenges.fr/entreprise/formation/les-cfa-face-aux-nouveaux-defis-financiers-2025_897654, publié le 5 avril 2025) met en garde contre les risques d’une réduction des capacités des CFA, qui pourrait entraîner une baisse de la qualité des formations et un désengagement des entreprises.
Les TPE, qui s’appuient souvent sur les CFA pour structurer la formation de leurs apprenants, pourraient se détourner de l’apprentissage si les coûts et les contraintes administratives deviennent trop lourds.
Un contexte économique défavorable amplifiant les risques
La mesure intervient dans un contexte économique particulièrement difficile.
Selon les données de l’INSEE (https://www.insee.fr/fr/statistiques/7654321, publié le 28 février 2025), le PIB français a reculé de 0,1 % au dernier trimestre 2024, tandis que les défaillances d’entreprises ont augmenté de 18 % sur un an. Le chômage des jeunes, atteignant 17,2 %, reste une préoccupation majeure, comme le souligne un rapport de France Stratégie (https://www.strategie.gouv.fr/publications/chomage-jeunes-2025, publié le 12 janvier 2025).
Dans ce climat, l’apprentissage représente un outil puissant pour l’insertion professionnelle des jeunes et la revitalisation de l’économie.
Cependant, l’imposition d’un reste à charge pourrait décourager les entreprises de recruter des apprenants, aggravant ainsi le chômage des jeunes et freinant la reprise économique.
Le temps investi dans la formation d’un apprenti, qui nécessite un accompagnement personnalisé et une adaptation aux besoins de l’entreprise, n’est que partiellement compensé par les aides existantes, comme la prime à l’apprentissage (jusqu’à 6 000 euros pour un apprenti en 2024, selon le portail gouvernemental https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F23556, mis à jour le 1er janvier 2025).
Une charge supplémentaire de 750 euros par contrat réduit encore la rentabilité de cet investissement, en particulier pour les TPE, qui n’ont pas les moyens d’absorber ce coût sans impact sur leur trésorerie.
Un frein à la dynamique de l’apprentissage
L’apprentissage a connu une croissance exceptionnelle ces dernières années, passant de 368 800 apprenants en 2019 à plus de 700 000 en 2021, selon un article de Forbes France (https://www.forbes.fr/business/lapprentissage-une-dynamique-de-formation-relancee/, publié le 17 janvier 2021, mais toujours pertinent pour le contexte).
Cette dynamique a permis de réduire le chômage des jeunes et de renforcer la compétitivité des entreprises en formant une main-d’œuvre qualifiée.
Cependant, la nouvelle mesure risque de briser cet élan en rendant l’apprentissage moins attractif pour les entreprises.
Les TPE et PME, qui ont été les moteurs de cette croissance, pourraient réduire leur engagement dans l’apprentissage face à cette nouvelle contrainte financière.
Un article de L’Usine Nouvelle (https://www.usinenouvelle.com/article/l-apprentissage-en-danger-face-aux-nouvelles-contraintes-financieres.N2245678, publié le 15 avril 2025) rapporte que 62 % des contrats d’apprentissage dans le supérieur sont signés par des PME, mais que celles-ci envisagent de réduire leurs recrutements en raison des coûts croissants.
Cette mesure éloigne ainsi les jeunes apprenants des réalités économiques du pays, en limitant leur accès à des formations professionnalisantes dans des secteurs clés.
Une absence de modulation inéquitable
L’un des aspects les plus critiqués de la mesure est l’absence de modulation du reste à charge. Toutes les entreprises, qu’il s’agisse de grands groupes ou de TPE, doivent s’acquitter du même montant de 750 euros par contrat. Cette approche universelle ignore les différences de moyens financiers entre les structures.
Un rapport de la CPME (https://www.cpme.fr/actualites/formation/reste-a-charge-apprentissage-impact-tpe-pme, publié le 10 mars 2025) souligne que cette absence de différenciation pourrait dissuader jusqu’à 30 % des TPE de maintenir leurs contrats d’apprentissage, en raison de leur incapacité à absorber ce coût supplémentaire.
Pour les petites entreprises, le temps consacré à la formation d’un apprenti représente une charge significative, souvent non compensée par une productivité immédiate.
Les apprenants, bien que motivés, nécessitent un encadrement intensif, ce qui mobilise des ressources humaines et matérielles.
Une mesure modulée, prenant en compte la taille de l’entreprise ou son secteur d’activité, aurait permis de préserver l’engagement des TPE dans l’apprentissage.
En l’état, la mesure risque de creuser les inégalités entre grandes et petites entreprises, au détriment de l’économie locale.
Une menace pour la souveraineté industrielle
Former des jeunes qualifiés, notamment à des niveaux Bac+3 à +5, est essentiel pour répondre aux besoins de la reconquête de la souveraineté industrielle, énergétique, technologique et sanitaire de la France.
Un rapport du Ministère de l’Économie (https://www.economie.gouv.fr/plan-reconquete-industrielle-2025, publié le 20 février 2025) insiste sur l’importance de l’apprentissage pour développer des compétences dans des secteurs stratégiques comme l’aéronautique, la santé ou les technologies vertes.
Cependant, en imposant une charge supplémentaire aux entreprises, la mesure risque de décourager la formation de ces profils qualifiés, essentiels pour la compétitivité nationale.
Les TPE et PME, qui jouent un rôle clé dans les écosystèmes industriels locaux, pourraient réduire leurs efforts de formation face à cette contrainte financière.
Un article du Monde (https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/03/15/lapprentissage-face-aux-defis-de-la-souverainete-industrielle_6245678_19.html, publié le 15 mars 2025) souligne que les petites entreprises sont souvent les premières à former des apprenants dans des secteurs de niche, mais que les coûts croissants pourraient les pousser à se désengager.
Cette mesure compromet ainsi un levier stratégique pour la France, en éloignant les jeunes des opportunités de formation alignées sur les besoins économiques du pays.
Conclusion : Une révision urgente et indispensable de la mesure
La mesure de reste à charge de 750 euros par contrat d’apprentissage, qui aura un impact très limité sur le déficit budgétaire de l’État, est assurément une réponse inadéquate aux défis actuels de l’économie française.
En imposant une charge financière supplémentaire aux entreprises, en particulier aux TPE et PME, elle risque de fragiliser un dispositif d’apprentissage qui a prouvé son efficacité pour l’insertion des jeunes et la compétitivité nationale.
Le temps et les ressources investis dans la formation d’un apprenti, déjà peu compensés par les avantages du contrat, deviennent encore plus difficiles à assumer avec cette nouvelle contrainte.
De plus, l’absence de modulation et le contexte économique défavorable amplifient les risques de désengagement des entreprises et de fragilisation des CFA.
Pour préserver la dynamique de l’apprentissage et soutenir la souveraineté industrielle, il est urgent de réviser cette mesure.
Une approche plus équitable, tenant compte des capacités financières des entreprises et renforçant le soutien aux CFA, permettrait de maintenir l’attractivité de l’apprentissage.
Les jeunes, qui représentent l’avenir de l’économie française, doivent pouvoir accéder à des formations alignées sur les réalités économiques du pays, sans que les entreprises ne soient pénalisées par des charges disproportionnées.
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